Notre part de nuit Mariana Enriquez
Vous avez un peu de temps devant vous ?
Alors ouvrez ce page-turner et laissez vous embarquer dans l’occultisme. Ordre, Obscurité, Médium, Initiés, Rites et Cérémonial vous plongent dans l’Autre monde en quête d’immortalité. Frissons garantis, ambiance envoûtante mais pas que.
C’est un roman gothique au scénario hyper bien construit dans le temps et l’espace, sur fond d’évènements historiques et sociétaux en Argentine et en Grande-Bretagne.
J’ai parfois fait une pause pour reprendre « mes esprits » sauf qu’arrivée au point final, je me suis sentie bien seule. Qu’allais-je bien pourvoir me mettre sous les yeux maintenant ?
Vous l’aurez compris, c’est un livre hypnotique mais allez-y, c’est un petit bijou littéraire.
La double vie de Médor André Bouchard
J’aime tout dans cet album jeunesse : d’abord, la complicité que le narrateur instaure avec nous lecteurs, car nous savons que Médor est en réalité un loup qui se fait passer pour un chien !!
Ensuite, je suis fan de la typographie, des illustrations et du ton de la narration qui donnent un look à la fois très « kitsch » et très « guindé » à cet album, à l’instar de la vieille dame au style vieillot et raffiné qui adopte notre imposteur canin.
En effet, dans cet album jeunesse, « vie de chien » est synonyme de « vie de faste » : votre gamelle déborde de mets délicieux et vous êtes pouponné et bichonné tel un seigneur de haut rang. Bon, vous vous passeriez bien des visites au musée, des coquetteries vestimentaires dont votre maîtresse vous affuble ou encore de la cérémonie du thé avec ses copines, mais que ne faut-il pas faire pour obtenir sa précieuse pitance !
Et la fin est délicieusement amenée… Pour sûr, je vais me ruer sur d’autres albums d’André Bouchard !!
Pour écouter le booktube de Nina sur « La double vie de Médor », suivez ce lien !! : https://www.youtube.com/watch?v=bpCbQgZcc6A&list=UUd2J6GxJeo0oF8hDfxOISvg&index=5
Hercule le Poireau Juliette Bullier
Vous connaissez Hercule Poirot, mais connaissez-vous Hercule Le Poireau ? C’est l’histoire d’un poireau qui vit dans un frigo avec tous ses amis. Un matin, tout le monde disparaît et Hercule va mener sa petite enquête pour les retrouver…
Les personnages sont tout mignons et ce qui est drôle, c’est qu’il y a énormément d’humour et surtout des jeux de mots, clins d’œil et détournements, certains compréhensibles des enfants et d’autres des adultes. Les autres livres de la collection « Les Bidules Chouettes » sont tous aussi bien : « Billy l’œuf au plat » et « Jacques le pain de mie ». Un livre pour faire rire petits et grands !
L'art de perdre Alice Zeniter
« L’art de perdre », c’est le roman de la famille de Naïma, petite fille d’Ali, exilé en 1962 avec sa femme et ses enfants dont Hamid, le père de Naïma. La Kabilie natale d’Ali, Naïma n’en a jamais entendu parler autrement que par les livres d’Histoire. A 25 ans, la jeune femme cherche à découvrir les raisons de ce silence qui s’est imposé jusqu’à chez son père, avare d’explications sur l’histoire familiale tout comme le grand-père.
La force de ce livre, c’est comment les regards s’entrecroisent à travers le temps et les pays, de la France coloniale à l’Algérie indépendante et de 1930 à nos jours : le regard des français metropolitains sur les exilés, celui des algériens restés au pays sur ces mêmes exilés, et enfin, des exilés sur les exilés : en effet, le fait d’appartenir à une famille harki constitue une entaille de plus dans une liste déjà bien longue de difficultés à trouver une identité et une place.
On voit donc comment, un peu par la force des choses, l’Histoire propulse son grand-père plutôt « du côté » des français et comment celui-ci se voit coller l’étiquette de « harki » qui le poursuivra bien au-delà des camps de transit dans lesquels la famille a vécu près de 2 ans.
Même si on parle ici de guerre d’Algérie, de kabyles et de harkis, ce roman peut parler à tous les enfants et petits-enfants d’exilés à travers le monde ; et même au-delà : avec une prose et une clairvoyance magistrale, Alice Zeniter donne à comprendre à quiconque s’y intéresse de près ou de loin tout ce qui peut se jouer dans une guerre d’indépendance, mais aussi donne à voir l’héritage de cette dernière dans les relations internationales, interculturelles et intergénérationnelles.
Mais ce qui en a fait un énorme coup de cœur pour moi, au-delà des descriptions « brutes » des évènements, c’est l’émotion et l’amour, très présents dans les relations entre les personnages malgré les nombreux silences que Naïma cherche à combler. Je ne suis pas prête de l’oublier !
Chouette Léna Mazilu
Et si on découvrait une nouvelle façon de raconter des histoires ?
« Chouette » raconte l’histoire d’une petite chouette qui trouve une paire de lunettes. Elle part alors à l’aventure pour retrouver leur propriétaire.
Ce livre n’est pas comme les autres : on peut le lire de façon magique, comme c’est le cas pour tous les livres « Histoires animées », une collection drôle et interactive dont on peut télécharger l’application afin de rendre la lecture plus vivante et amusante. En effet, quand on passe une tablette ou un smartphone au dessus des pages du livre, celui-ci prend vie sur l’écran ! On peut alors voir bouger ses illustrations très colorées et très mignonnes…
Vous pouvez choisir le mode de lecture (l’enfant, vous ou l’application). D’ailleurs, même si l’enfant ne sait pas lire, l’application propose la voix et il entend une cloche pour tourner les pages.
Une superbe découverte !
Pour écouter le booktube de Marie-Line sur « Chouette », suivez ce lien !! : https://www.youtube.com/watch?v=aq1scqmq4RA&list=UUd2J6GxJeo0oF8hDfxOISvg&index=11
Un chagrin d'amour avec le monde entier Eric Pessan ; vu par Sylvie Sauvageon
Quelle écriture que celle d’Eric Pessan, tout en finesse, tout en beauté ! Quelle part féminine de lui-même ou de son entourage a-t-il convoqué pour ainsi conférer aux mots de la narratrice une telle résonnance chez les lecteurs – je dirais-même davantage, chez les lectrices ? Au fil de ses confessions, le portrait de cette femme libre, indépendante et saillante se dessine avec ses déterminations mais aussi ses fragilités, tandis que le crayon de Sylvie Sauvageon croque un visage – le visage de celui qui fait l’objet de son éternel chagrin d’amour ? Son visage à elle ? En fuite perpétuelle vers un amour idéal, cette femme qui vit les choses intensément m’a touchée comme peu de personnages fictifs mais réels l’ont fait.
« C’est la seconde fois que nous nous retrouvions. Nous n’étions plus dans un café-librairie mais dans un bar, la nuit commençait juste.
Un présent absolu, j’ai continué. Le présent de leur amour conjure le passé et maintient l’avenir à distance.
Chaque verbe conjugué à un autre temps que le présent est tragique, j’ai dit.
Il a réfléchi.
Il a bu une gorgée de bière.
J’ai aimé sa façon de prendre le verre entre deux doigts, la fragilité de cette impulsion, le balancement du verre pourtant maîtrisé. Je l’ai regardé boire.
C’était peut-être ça, son geste à lui : un déséquilibre qui ne chute pas.
Etre romantique, c’est ne vivre qu’au passé et au futur, il a enfin répondu.
J’avais envie de l’embrasser.
Je ne l’ai pas embrassé.
La faute à hier.
La faute à demain. »